Laits infantiles : une bonne idée ?
Vous vous doutez déjà de ma réponse, n’est-ce pas ? En effet, ce n'est pas une bonne idée :(
Attention, je ne veux surtout pas jeter la pierre à celles qui choisissent de ne pas allaiter. De plus, même si je trouve qu’une jeune maman n’a pas à se justifier, il y a des cas dans lesquels l’allaitement n’est pas conseillé ou simplement pas possible. C’est rare, mais il existe par exemple des pathologies hormonales qui entraînent des difficultés à allaiter. Il y a également des contre-indications, notamment la prise de certains médicaments ou une maladie métabolique chez le nourrisson. Et puis, il y a tous ces cas où l’allaitement est tout simplement trop douloureux et où on doit jeter l’éponge.
Ne pas allaiter n’est pas une catastrophe et il n’y a pas mort d’homme. Mais il importe de bien choisir le lait infantile.
Tout d’abord, au cas où l’idée vous serait venue, oubliez le lait animal (de vache ou d’un autre animal) et oubliez aussi le lait végétal (soja, riz, etc.) pour nourrir un bébé. Leur composition n’est simplement pas du tout adaptée à ses besoins ! Je répète : pas de lait animal ni de lait végétal pour nourrir un bébé, sa composition n’est pas du tout adaptée à ses besoins. Pour les laits animaux, le rapport entre caséine et lactoferrine est inadapté et augmente le risque d’allergie et le contenu élevé en calcium et en potassium risque de surcharger les reins du bébé. D’un point de vue nutritionnel, ils contiennent aussi trop de protéines et de minéraux et pas assez de glucides et leur composition en acides gras ne correspond pas aux besoins du bébé. De leur côté, les laits végétaux ne sont pas assez riches en lipides et en glucides et ne contiennent ni lactose, ni caséine. Si vous avez besoin de le voir pour le croire, voici un petit comparatif entre le lait maternel, le lait de vache et le lait de soja (pour ce dernier, je me suis basée sur des moyennes, car sa composition n’est pas normalisée) :
Concernant les laits infantiles, le pédiatre dira peut-être qu’ils doivent tous répondre à la législation en la matière et qu’ils sont donc parfaitement sûrs. Je trouve important de nuancer ce discours. C’est vrai qu’ils doivent respecter une législation assez complexe qui vise à optimiser leur composition, en fixant le contenu minimum et maximum en protéines (dont l’acide aminé carnitine), en lipides (dont l’AL, l’ALA et le DHA), en glucides (dont le lactose), en vitamines et en minéraux, tout en excluant certains nutriments contre-indiqués. Mais, au sein des laits infantiles mis sur le marché et qui respectent donc – en principe – cette réglementation, je vous encourage à choisir selon les critères suivants :
Le rapport entre caséine et protéines de lactosérum devrait être le plus proche possible de 30/70, qui est celui du lait maternel. Les protéines de lactosérum comprennent la lactoferrine, qui est très importante pour l’immunité par son action bactériostatique (= inhibe la multiplication des bactéries) et bactéricide (= tue les bactéries) ;
La teneur en protéines ne devrait pas dépasser 1.5 g/100 ml (la législation impose une teneur minimale de 1.8 g/100 kcal et maximale de 2.5 g/100 kcal, ce qui n’est pas directement transposable en g/ml sans connaître la composition nutritionnelle du lait concerné) ;
Le seul glucide présent devrait être le lactose (la législation permet la présence d’autres sucres, jusqu’à maximum 20 % de la teneur en glucides) ;
Les lipides devraient constituer entre 45 et 50 % de l’apport énergétique (la législation impose une teneur minimale de 4.4 g/100 kcal et maximale de 6.0 g/100 kcal, soit entre 44 et 60 % de l’apport énergétique) ;
Le lait devrait être enrichi en pré et probiotiques ;
Un éventuel enrichissement en prébiotiques HMO (oligosaccharides de lait maternel, par exemple le 2’-fucosyllactose) est bénéfique.
Après les laits infantiles, il y a encore des laits de suite à partir de six mois et des laits de croissance à partir de 12 mois (ou 18 mois si l’enfant prend un lait infantile à indication spécifique) et jusqu’à trois ans. Les laits de croissance ont une composition qui se rapproche de celle du lait de vache, avec moins de protéines et plus de vitamines et de fer. Évitez ceux qui ont des additifs, notamment des arômes.
En plus des laits infantiles de base, il existe des laits à indication spécifique, comme des laits anti-reflux, anti-coliques, anti-constipation ou hypoallergéniques (qui sont en voie de disparition par manque d’utilité). Si un nourrisson souffre de reflux ou de coliques, je vous conseille de d’abord évaluer si le problème ne provient pas d’une prise trop rapide, d’une quantité trop importante, ou du fait de le tenir en comprimant son estomac. Dans les laits anti-coliques, les protéines sont effet coupées, fractionnées en polypeptides, voire en acides aminés, afin de faciliter leur digestion. Ils contiennent aussi des pré et probiotiques et des enzymes lactiques. Cela éloigne leur composition de la composition « idéale ». Les laits anti-reflux, eux, sont soit épaissis, par exemple à la farine de caroube (qui peut dans de rares cas provoquer des réactions allergiques), soit contiennent une substance qui s’épaissit au contact de l’acidité gastrique. À n’utiliser que si vraiment nécessaire.
Je vous conseille aussi d’utiliser des biberons en verre. Un biberon en plastique ne devrait pas être chauffé ou contenir de lait chaud (cela présente un risque de relargage de toxiques et perturbateurs endocriniens). Le lait peut être chauffé à environ 37 °C ; il ne faut surtout pas le chauffer plus pour le laisser refroidir ensuite, car un lait chauffé à plus de 50 °C voit sa teneur en carboxyméthyllysine augmentée (c’est un produit de glycation avancé), d’autant qu’il en contient déjà, car il a subi un traitement à haute température lors de sa fabrication. Enfin, l’eau ajoutée au lait déshydraté doit être faiblement minéralisée, afin de ne pas surcharger les reins du nourrisson (l’étiquette doit porter la mention « convient pour la préparation des aliments des nourrissons »).
Pour aller plus loin, lisez aussi ces articles :
Sur l'alimentation et la complémentation pendant la grossesse : https://isabellemaesnutrition.com/grossesse
Sur les liens entre fertilité et alimentation : https://isabellemaesnutrition.com/fertilite
Photo bébé de Kelly Sikkema